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Cargando... Jacob, Tome 1 : Le gué du Yabboqpor Gérald Messadié
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L'auteur fait de Jacob un pionnier de la découverte du Dieu unique sur fond de croyances polythéistes. On peut d'ailleurs comprendre le désarroi et la perplexité de Jacob devant la multiplicité des pratiques religieuses, lui qui est le petit-fils de l'homme à qui le "Très-Haut" a demandé son Premier-Né, Isaac, et dont la main a été arrêtée. Tout au long des deux tomes du roman, Jacob s'interroge sur l'identité de ce Très-Haut et sur le sens de sa vie dans le dessein de la divinité inconnue. Cette interrogation lui apparaît crûment au gué du Yabboq lorsqu'il se battra toute la nuit avec Dieu. Combat nocturne fondateur dont Gérald Messadié ne fait pas une analyse théologique. Il précise juste que ce combat lui semble avoir été directement avec Dieu (évènement unique dans la Bible) plutôt qu'avec un ange, comme le suggère la tradition chrétienne. L'Innommé qui changera le nom de Jacob en Israël demandera paradoxalement à rompre le combat alors que Jacob ne le souhaite pas. Dans ce tenace pugilat divin admirablement rendu par l'auteur dans une tempête de vent, il semble que le Très-Haut teste la capacité de résistance de l'Homme, un peu comme s'il cherchait la validation d'un choix fait pour l'Histoire du Salut avec la descendance d'Abraham. L'histoire de Dieu se confond dès lors étroitement avec la sueur et le sang des hommes. Le combat du Yabboq raconté par l'auteur n'est pas vraiment spirituel. C'est une incarnation brutale, frontale, une lutte dont Jacob gardera le stigmate dans la hanche. C'est une histoire de chair, de muscles, de poings. Le Gué du Yabboq est cet endroit où l'Homme passe en force sur la rive de Dieu et où Dieu se rapproche de la condition humaine. Cette histoire trouvera son achèvement au Golgotha, où Dieu n'arrêtera pas pour son propre fils la main retenue pour Isaac. L'adoption filiale du peuple hébreu par Dieu et au-delà, de la multitude humaine, s'est sans doute réalisée dans ces horions échangés au milieu de la rivière. Cela rentre en ligne de compte dans le mystère d'Israël.
Dans son récit, l'auteur fait état de cette vieille tradition qui consiste à se rapprocher de la divinité sous l'emprise de substances psychotropes. La prise de drogues pour entrer dans un état second est très ancienne et subsiste encore aujourd'hui soit dans les sociétés traditionnelles avec les chamans, soit dans les sociétés modernes avec les dérives d'accoutumance que l'on connaît. Ainsi, sous la plume de l'auteur, et à la suite de la connaissance qu'il en aurait eut auprès du clan de son beau-père Laban, Jacob prend de la racine de mandragore avant de traverser la rivière Yabboq, semble-t-il pour se soulager de quelques angoisses liées aux éventuelles retrouvailles avec son frère Esaü. Plus tard encore, l'auteur place le plus jeune fils, Joseph, sous l'emprise de cette plante lors de la séance d'explication des rêves de Pharaon. On sait que la mandragore est riche en alcaloïde, tout comme le tabac et compte tenu de la forme particulière et anthropomorphe de sa racine, de nombreuses légendes lui sont attribuées. Il est d'ailleurs mentionné dans la Genèse la prise de cette plante par les épouses de Jacob (Gen 30-14), mais dans un but de fécondité. Si dans une chanson restée célèbre "Dieu est un fumeur de Havane", il n'en reste pas moins que l'on reste dubitatif devant l'utilisation de rites magiques anciens dans une situation où ce qui est cherché est avant tout la rupture avec les pratiques anciennes. Comme le dira plus tard Jésus en d'autres termes imagés, "on ne fait pas du neuf avec du vieux". Par ailleurs, la révélation progressive de Dieu à l'Homme ne peut être lié à l'usage de psychotropes, auquel cas ce qui relie l'Homme à Dieu n'est "qu'opium du peuple", extrémité de langage à laquelle sont parvenus certains entraîneurs de foules avec les conséquences sanguinaires que l'on connaît. Les authentiques expériences spirituelles connues à travers l'Histoire, quelque soit la religion, n'ont pas été conduites sous l'empire d'une drogue qui altéraient les facultés mentales de raisonnement et de jugement. L'option de l'auteur reste contestable, même empreinte de sincérité et de recherches.
Par ailleurs, on pourrait arguer que les différences du récit biblique avec la vérité historique sont tout à fait logiques dans le sens où l'histoire racontée dans la Bible est l'histoire du Salut et non précisément l'histoire des hommes. Il y a un côté moralisateur très net dans cette découverte du Dieu unique, et cette morale ne peut être retrouvée qu'après une reprise au fil du temps des différentes strates de l'Histoire. Gérald Messadié pense que Jacob a réellement existé mais que sur sa personne ont été fondées des légendes reprises ultérieurement dans la Bible. Il en va ainsi de l'histoire des nations, qui ont besoin d'un évènement fondateur pour asseoir leur légitimité. La République française n'a pas fait autrement avec "nos ancêtres les Gaulois" et les mythes attachés à la Révolution. Comme l'auteur le mentionne justement dans sa postface, ses écrits s'inscrivent dans une tentative d'interprétation. Faisons-lui crédit de cette précaution de langage héritée de sa rigueur scientifique. Malgré les réserves exprimées ci-dessus, prenons ce roman historique comme tel avec le réel plaisir de la lecture qui y est associé. Il n'en faut pas plus pour redécouvrir une histoire commune dont les conséquences sur les civilisations du monde moderne ont été très importantes. ( )