Josep Maria Miró

Voilà qui fait réfléchir… Le Principe d’Archimède est une pièce moderne sur un sujet moderne, la pédophilie. Enfin, pas tout à fait la pédophilie. Plutôt les réactions que des soupçons de pédophilie, ou même « seulement » de gestes déplacés envers des enfants, peuvent engendrer.
Nous sommes dans une piscine. Les maîtres nageurs font leur boulot avec le groupe des dauphins et celui des hippocampes. Ils déconnent un peu dans les vestiaires, un père vient voir la directrice, il a des interrogations, il soupçonne. Des parents veulent protéger leurs enfants sans chercher à faire la part des choses, principe de précaution oblige, et on les comprend. Un homme voit sa réputation salie en moins de temps qu’il n’en faut pour plonger dans le grand bain et il veut faire entendre sa bonne foi, qui ne le comprendrait pas ? Des collègues veulent rester professionnels mais ne peuvent s’empêcher de s’interroger. Comme le dit Pierre, à partir de maintenant, tout ce qu’il dit ou fait sera scruté, interprété, sur-interprété. Déjà plus rien n’est pas avant, plus rien ne sera plus pareil. Paranoïa de notre société, qui pourtant, comme le dit un des personnages, n’empêchent pas que de tels évènements aient lieu toujours et encore.
Cette pièce à la construction savante, faite de retours en arrière successifs, ne tranche pas. Nous ne saurons pas en définitive si Pierre est coupable de ce dont on l’accuse ou non. Et c’est mieux ainsi, puisqu’effectivement le propos n’est pas là. Ce n’est pas d’être coupable ou innocent dont il est question ici, c’est le principe de précaution contre la présomption d’innocence si je veux mettre des gros mots sur le drame qui se joue dans cette pièce. Et l’auteur donne toutes les cartes au spectateur ou au lecteur pour qu’il puisse tour à tour se mettre dans la peau de chaque personnage. Le parent, l’accusé, le responsable hiérarchique, le collègue-copain. Que ferions-nous, que penserions-nous ?
Une pièce de théâtre très contemporaine par son sujet, brûlante d’actualité alors que l’affaire d’Outreau vit ses derniers soubresauts judiciaires. Si elle n’a pas de qualités littéraires particulières, cette pièce est extrêmement efficace et fait réfléchir sans en avoir l’air. A conseiller à tout parent, tout professionnel qui a charge d’enfants, tout citoyen.… (más)