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Julia o La nueva Eloísa (1761)

por Jean-Jacques Rousseau

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A novel in which Rousseau reconceptualized the relationship of the individual to the collective and articulated a new moral paradigm
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L’histoire de Julie ou La nouvelle Héloïse est celle d’un Amour fervent, passionné mais contrarié par les mœurs de l’époque, la division d’une société de classes, et l’obsession que la jeune fille nourrit pour la vertu.
Cet amour lie la jeune Julie, une jeune noble fille du baron d’Etanges, à son précepteur Saint-Preux.
Seul roman de Jean-Jacques Rousseau, La Nouvelle Héloïse est un roman épistolaire paru en 1761 qui remporta un succès très retentissant.
Succès peu surprenant étant donné que Rousseau y invente en somme une nouvelle manière de sentir et de dire l’amour. Avec au moins 70 éditions avant 1800, le roman a peut-être été l’ouvrage ayant réalisé les meilleures ventes au 18ème siècle !
Il faut dire que le projet était quelque peu à contre-courant de l’époque marquée par le roman libertin (Diderot, Crébillon…). Tandis que le libertin se libère de l’amour à travers la conquête sexuelle, la voie de Rousseau est de se libérer dans l’amour. Il est assez émouvant d’apprendre que Rousseau crée cette histoire de passion amoureuse qu’il n’a pas connue au cours de sa vie mais qu’il aurait très certainement aimé connaître, à l’approche de la cinquantaine.
La langue, emplie de transports, d’effusions sentimentales et poétiques, recèle une beauté toute particulière. C’est la langue du 18ème siècle portée à son sommet.
Le roman est empreint de la philosophie de Rousseau qui loue l’authenticité et le rapport à la nature. Rousseau a tout loisir de faire l’éloge de l’authenticité à travers les lettres que Saint-Preux, désormais installé à Paris, adresse à Julie, restée au bord du lac Léman. La société parisienne, décrite comme un véritable théâtre, avec ses codes et ses us, donne lieu à de très belles lettres, piquantes et aux allures de pamphlet.
L’association du raisonnement froid et sage de M. de Wolmar (que Julie finira par épouser, à la demande de son père) et la sensibilité aiguë de Julie fait merveille dans l’existence maritale qu’ils mènent sur le domaine de Clarens, décrit comme un lieu où tout est en harmonie, à la limite de l’utopie.
Rousseau distingue clairement l’amour du mariage, comme le fera non moins clairement Simone de Beauvoir dans Le deuxième sexe, deux siècles plus tard.
Vu de Paris, le mariage n’est plus une alliance de biens communs mais une simple mascarade :
« On dirait que le mariage n'est pas à Paris de la même nature que partout ailleurs. C'est un sacrement, à ce qu'ils prétendent, et ce sacrement n'a pas la force des moindres contrats civils; il semble n'être que l'accord de deux personnes libres qui conviennent de demeurer ensemble, de porter le même nom, de reconnaître les mêmes enfants, mais qui n'ont, au surplus, aucune sorte de droit l'une sur l'autre; et un mari qui s'aviserait de contrôler ici la mauvaise conduite de sa femme n'exciterait pas moins de murmures que celui qui souffrirait chez nous le désordre public de la sienne. Les femmes, de leur côté, n'usent pas de rigueur envers leurs maris et l'on ne voit pas encore qu'elles les fassent punir d'imiter leurs infidélités. Au reste, comment attendre de part ou d'autre un effet plus honnête d'un lien où le cœur n'a point été consulté ? Qui n'épouse que la fortune ou l'état ne doit rien à la personne. »
En effet, « comment attendre de part ou d'autre un effet plus honnête d'un lien où le cœur n'a point été consulté ? ». Tout est dit.

Le sentiment et l’attachement amoureux sont décrits avec beaucoup de finesse et d’acuité, notamment pour l’époque, et l’on s’en délecte d’autant plus à travers une langue aussi ravissante et raffinée.
Extraits :
(Lettres de Julie à Saint-Preux) :
« Votre lettre même vous dément par son style enjoué, et vous n'auriez pas tant d'esprit si vous étiez moins tranquille. »
Vaincre la jalousie par les serments et les aveux
« Jure-moi donc, mon doux ami, non par l'amour, serment qu'on ne tient que quand il est superflu, mais par ce nom sacré de l'honneur, si respecté de toi, que je ne cesserai jamais d'être la confidente de ton cœur, et qu'il n'y surviendra point de changement dont je ne sois la première instruite. Ne m'allègue pas que tu n'auras jamais rien à m'apprendre ; je le crois, je l'espère ; mais préviens mes folles alarmes, et donne-moi, dans tes engagements pour un avenir qui ne doit point être, l'éternelle sécurité du présent. Je serais moins à plaindre d'apprendre de toi mes malheurs réels, que d'en souffrir sans cesse d'imaginaires. »
« Il y a je ne sais quelle délicatesse qui m'enchante à me fier de ton amour à ta bonne foi, et à m'ôter le pouvoir de croire une infidélité que tu ne m'apprendrais pas toi-même. Voilà, mon cher, l'effet assuré de l'engagement que je t'impose ; car je pourrais te croire amant volage, mais non pas ami trompeur ; et quand je douterais de ton cœur, je ne puis jamais douter de ta foi. »
« Je jugeai qu'un cœur si sincère était incapable d'une infidélité cachée ; je trouvai moins de tort dans votre faute que de mérite à la confesser, et, me rappelant vos anciens engagements, je me guéris pour jamais de la jalousie. »
L’absence et le manque… mais aussi le besoin de solitude pour aimer
(Julie à Saint-Preux)
« Privée de toi, je reste sans ressource, sans appui, sans espoir ; le passé m'avilit, le présent m'afflige, l'avenir m'épouvante. »
(Saint-Preux à Julie) :
« Il faut tout fuir et vivre seul au monde, quand on n'y peut vivre avec vous. »
(Julie à Saint-Preux)
« Toutes les grandes passions se forment dans la solitude ; on n'en a point de semblables dans le monde, où nul objet n'a le temps de faire une profonde impression, et où la multitude des goûts énerve la force des sentiments. Cet état aussi plus convenable à ma mélancolie ; elle s'entretient du même aliment que mon amour : c'est ta chère image qui soutient l'une et l'autre, et j'aime mieux te voir tendre et sensible au fond de mon cœur, que contraint et distrait dans une assemblée. »
Sans être un révolutionnaire en ce domaine, Rousseau est néanmoins tout à fait conscient de la condition des femmes de son époque et du rôle qu’elles jouent dans la société :
(Julie à Saint-Preux)
« Considère dans nos communes infortunes l'état de mon sexe et du tien, et juge qui de nous est le plus à plaindre. Dans la force des passions, affecter d'être insensible, en proie à mille peines, paraître joyeuse et contente ; avoir l'air serein et l'âme agitée ; dire toujours autrement qu'on ne pense ; déguiser tout ce qu'on sent ; être fausse par devoir, et mentir par modestie : voilà l'état habituel de toute fille de mon âge. »
« S'il eût dépendu de moi, je ne me serais point mariée ; mais dans notre sexe on n'achète la liberté que par l'esclavage, et il faut commencer par être servante pour devenir sa maîtresse un jour. »
(Saint-Preux à Julie)
« Les femmes de Paris aiment à voir les spectacles, c'est-à-dire à y être vues ; mais leur embarras, chaque fois qu'elles y veulent aller, est de trouver une compagne ; car l'usage ne permet à aucune femme d'y aller seule en grande loge, pas même avec son mari, pas même avec un autre homme. On ne saurait dire combien, dans ce pays si sociable, ces parties sont difficiles à former ; de dix qu'on en projette, il en manque neuf : le désir d'aller au spectacle les fait lier ; l'ennui d'y aller ensemble les fait rompre. Je crois que les femmes pourraient abroger aisément cet usage inepte ; car où est la raison de ne pouvoir se montrer seule en public. »
« il est certain qu'elles ont du penchant au bien, qu'elles en font beaucoup, qu'elles le font de bon cœur, que ce sont elles seules qui conservent dans Paris le peu d'humanité qu'on y voit régner encore, et que sans elles on verrait les hommes avides et insatiables s'y dévorer comme des loups. »
« le ton de la conversation y est coulant et naturel; il n'est ni pesant, ni frivole; il est savant sans pédanterie, gai sans tumulte, poli sans affectation, galant sans fadeur, badin sans équivoques. Ce ne sont ni des dissertations ni des épigrammes : on y raisonne sans argumenter ; on y plaisante sans jeux de mots ; on y associe avec art l'esprit et la raison, les maximes et les saillies, la satire aiguë, l'adroite flatterie, et la morale austère. On y parle de tout pour que chacun ait quelque chose à dire; on n'approfondit point les questions de peur d'ennuyer, on les propose comme en passant, on les traite avec rapidité; la précision mène à l'élégance : chacun dit son avis et l'appuie en peu de mots; nul n'attaque avec chaleur celui d'autrui, nul ne défend opiniâtrement le sien; on discute pour s'éclairer, on s'arrête avant la dispute; chacun s'instruit, chacun s'amuse, tous s'en vont contents, et le sage même peut rapporter de ces entretiens des sujets dignes d'être médités en silence. Mais au fond, que penses-tu qu'on apprenne dans ces conversations si charmantes ? A juger sainement des choses du monde ? à bien user de la société ? à connaître au moins les gens avec qui l'on vit ? Rien de tout cela, ma Julie. On y apprend à plaider avec art la cause du mensonge, à ébranler à force de philosophie tous les principes de la vertu, à colorer de sophismes subtils ses passions et ses préjugés, et à donner à l'erreur un certain tour à la mode selon les maximes du jour. Il n'est point nécessaire de connaître le caractère des gens, mais seulement leurs intérêts, pour deviner à peu près ce qu'ils diront de chaque chose. Quand un homme parle, c'est pour ainsi dire son habit et non pas lui qui a un sentiment ; et il en changera sans façon tout aussi souvent que d'état. Donnez-lui tour à tour une longue perruque, un habit d'ordonnance et une croix pectorale, vous l'entendrez successivement prêcher avec le même zèle les lois, le despotisme, et l'inquisition. Il y a une raison commune pour la robe, une autre pour la finance, une autre pour l'épée. Chacun prouve très bien que les deux autres sont mauvaises, conséquence facile à tirer pour les trois. Ainsi nul ne dit jamais ce qu'il pense, mais ce qu'il lui convient de faire penser à autrui ; et le zèle apparent de la vérité n'est jamais en eux que le masque de l'intérêt. »
« En un mot, tout est absurde, et rien ne choque, parce qu'on y est accoutumé ; et il y a même à cette inconséquence une sorte de bon air dont bien des gens se font honneur. En effet, quoique tous prêchent avec zèle les maximes de leur profession, tous se piquent d'avoir le ton d'une autre. Le robin prend l'air cavalier ; le financier fait le seigneur ; l'évêque a le propos galant ; l'homme de cour parle de philosophie ; l'homme d'Etat de bel esprit : il n'y a pas jusqu'au simple artisan qui, ne pouvant prendre un autre ton que le sien, se met en noir les dimanches pour avoir l'air d'un homme de palais. Les militaires seuls ; dédaignant tous les autres états, gardent sans façon le ton du leur, et sont insupportables de bonne foi. »
« Jusques ici j'ai vu beaucoup de masques, quand verrai-je des visages d’hommes ? »
Le théâtre parisien
Maintenant on copie au théâtre les conversations d'une centaine de maisons de Paris. Hors de cela, on n'y apprend rien des mœurs des Français. Il y a dans cette grande ville cinq ou six cent mille âmes dont il n'est jamais question sur la scène. Molière osa peindre des bourgeois et des artisans aussi bien que des marquis ; Socrate faisait parler des cochers, menuisiers, cordonniers, maçons. Mais les auteurs d'aujourd'hui, qui sont des gens d'un autre air, se croiraient déshonorés s'ils savaient ce qui se passe au comptoir d'un marchand ou dans la boutique d'un ouvrier ; il ne leur faut que des interlocuteurs illustres, et ils cherchent dans le rang de leurs personnages l'élévation qu'ils ne peuvent tirer de leur génie.
Pamphlet percutant et même assez drôle sur l'opéra de Paris
« L'Opéra de Paris passe à Paris pour le spectacle le plus pompeux, le plus voluptueux, le plus admirable qu'inventa jamais l'art humain. C'est, dit-on, le plus superbe monument de la magnificence de Louis XIV. Il n'est pas si libre à chacun que vous le pensez de dire son avis sur ce grave sujet. Ici l'on peut disputer de tout, hors de la musique et de l’Opéra ; il y a du danger à manquer de dissimulation sur ce seul point. La musique française se maintient par une inquisition très sévère ; et la première chose qu'on insinue par forme de leçon à tous les étrangers qui viennent dans ce pays, c'est que tous les étrangers conviennent qu'il n'y a rien de si beau dans le reste du monde que l'Opéra de Paris. En effet, la vérité est que les plus discrets s'en taisent, et n'osent rire qu'entre eux. »
« La Bruyère ne concevait pas comment un spectacle aussi superbe que l'Opéra pouvait l'ennuyer à si grands frais. Je le conçois bien, moi, qui ne suis pas un La Bruyère ; et je soutiens que, pour tout homme qui n'est pas dépourvu du goût des beaux-arts, la musique française, la danse et le merveilleux mêlés ensemble, feront toujours de l'Opéra de Paris le plus ennuyeux spectacle qui puisse exister. Après tout, peut-être n'en faut-il pas aux Français de plus parfaits, au moins quant à l'exécution : non qu'ils ne soient très en état de connaître la bonne, mais parce qu'en ceci le mal les amuse plus que le bien. Ils aiment mieux railler qu’applaudir ; le plaisir de la critique les dédommage de l'ennui du spectacle ; et il leur est plus agréable de s'en moquer, quand ils n'y sont plus, que de s'y plaire tandis qu'ils y sont. »
L’appel à d’authenticité
« la vérité qui blâme est plus honorable que la vérité qui loue; car la louange ne sert qu'à corrompre ceux qui la goûtent, et les plus indignes en sont toujours les plus affamés. »
« quel charme peut avoir une vie privée à la fois d'amour et d'honnêteté ? Aussi, comme le grand fléau de tous ces gens si dissipés est l'ennui, les femmes se soucient-elles moins d'être aimées qu'amusées : la galanterie et les soins valent mieux que l'amour auprès d'elles, et, pourvu qu'on soit assidu, peu leur importe qu'on soit passionné. Les mots même d'amour et d'amant sont bannis de l'intime société des deux sexes, et relégués avec ceux de chaîne et de flamme dans les romans qu'on ne lit plus. »
« Je les trouvai plus jolies [les femmes] depuis qu'elles ne cherchaient plus tant à l'être, et je sentis qu'elles n'avaient besoin pour plaire que de ne se pas déguiser. J'osai soupçonner sur ce fondement que Paris, ce prétendu siège du goût, est peut-être le lieu du monde où il y en a le moins, puisque tous les soins qu'on y prend pour plaire défigurent la véritable beauté. »
« Le premier pas vers le vice est de mettre du mystère aux actions innocentes ; et quiconque aime à se cacher a tôt ou tard raison de se cacher. Un seul précepte de morale peut tenir lieu de tous les autres, c'est celui-ci : ne fais ni ne dis jamais rien que tu ne veuilles que tout le monde voie et entende ; et, pour moi, j'ai toujours regardé comme le plus estimable des hommes ce Romain qui voulait que sa maison fût construite de manière qu'on vît tout ce qui s'y faisait. »
« Ce peuple imitateur serait plein d'originaux, qu'il serait impossible d'en rien savoir ; car nul homme n'ose être lui-même. Il faut faire comme les autres, c'est la première maxime de la sagesse du pays. Cela se fait, cela ne se fait pas : voilà la décision suprême. Cette apparente régularité donne aux usages communs l'air du monde le plus comique, même dans les choses les plus sérieuses : on sait à point nommé quand il faut envoyer savoir des nouvelles; quand il faut se faire écrire, c'est-à-dire faire une visite qu'on ne fait pas; quand il faut la faire soi-même; quand il est permis d'être chez soi; quand on doit n'y être pas, quoiqu'on y soit; quelles offres l'on doit faire, quelles offres l'autre doit rejeter; quel degré de tristesse on doit prendre à telle ou telle mort; combien de temps on doit pleurer à la campagne; le jour où l'on peut revenir se consoler à la ville; l'heure et la minute où l'affliction permet de donner le bal ou d'aller au spectacle. Tout le monde y fait à la fois la même chose dans la même circonstance ; tout va par temps comme les évolutions d'un régiment en bataille : vous diriez que ce sont autant de marionnettes clouées sur la même planche, ou tirées par le même fil. »
La tempérance et la vertu
« les désirs toujours réprimés s'accoutument à ne plus renaître, et les tentations ne se multiplient que par l'habitude d'y succomber. »
Vertueux jusqu’à en perdre la sagesse (Saint-Preux à Julie)
« Fille trop soumise, amante sans courage, tous nos maux nous viennent de tes erreurs. Hélas ! un cœur moins pur t'aurait bien moins égarée ! Oui, c'est l'honnêteté du tien qui nous perd ; les sentiments droits qui le remplissent en ont chassé la sagesse. Tu as voulu concilier la tendresse filiale avec l'indomptable amour ; en te livrant à la fois à tous tes penchants, tu les confonds au lieu de les accorder, et deviens coupable à force de vertu. »
Quelle distance pour observer le monde ?
« Ainsi je commence à voir les difficultés de l'étude du monde, et je ne sais pas même quelle place il faut occuper pour le bien connaître. Le philosophe en est trop loin, l'homme du monde en est trop près. L'un voit trop pour pouvoir réfléchir, l'autre trop peu pour juger du tableau total. Chaque objet qui frappe le philosophe, il le considère à part ; et, n'en pouvant discerner ni les liaisons ni les rapports avec d'autres objets qui sont hors de sa portée, il ne le voit jamais à sa place, et n'en sent ni la raison ni les vrais effets. L'homme du monde voit tout, et n'a le temps de penser à rien : la mobilité des objets ne lui permet que de les apercevoir, et non de les observer ; ils s'effacent mutuellement avec rapidité, et il ne lui reste du tout que des impressions confuses qui ressemblent au chaos. On ne peut pas non plus voir et méditer alternativement, parce que le spectacle exige une continuité d'attention qui interrompt la réflexion. Un homme qui voudrait diviser son temps par intervalles entre le monde et la solitude, toujours agité dans sa retraite et toujours étranger dans le monde, ne serait bien nulle part. Il n'y aurait d'autre moyen que de partager sa vie entière en deux grands espaces : l'un pour voir, l'autre pour réfléchir. Mais cela même est presque impossible, car la raison n'est pas un meuble qu'on pose et qu'on reprenne à son gré, et quiconque a pu vivre dix ans sans penser ne pensera de sa vie. »
Vieillir et mourir
« Que tardons-nous à faire un pas qu'il faut toujours faire ? Attendrons-nous que la vieillesse et les ans nous attachent bassement à la vie après nous en avoir ôté les charmes, et que nous traînions avec effort, ignominie et douleur, un corps infirme et cassé ? Nous sommes dans l'âge où la vigueur de l'âme la dégage aisément de ses entraves, et où l'homme sait encore mourir ; plus tard, il se laisse en gémissant arracher à la vie. Profitons d'un temps où l'ennui de vivre nous rend la mort désirable ; craignons qu'elle ne vienne avec ses horreurs au moment où nous n'en voudrons plus. »
« A mesure qu'on avance en âge, tous les sentiments se concentrent. On perd tous les jours quelque chose de ce qui nous fut cher, et l'on ne le remplace plus. On meurt ainsi par degrés, jusqu'à ce que, n'aimant enfin que soi-même, on ait cessé de sentir et de vivre avant de cesser d'exister. Mais un cœur sensible se défend de toute sa force contre cette mort anticipée : quand le froid commence aux extrémités, il rassemble autour de lui toute sa chaleur naturelle ; plus il perd, plus il s'attache à ce qui lui reste, et il tient pour ainsi dire au dernier objet par les liens de tous les autres. »
Des remarques qui frappent par leur grande finesse, comme dans cette lettre que le mari de Julie adresse à la cousine (et grande amie) de cette dernière :
« un voile de sagesse et d'honnêteté fait tant de replis autour de son cœur [le cœur de Julie], qu'il n'est plus possible à l'œil humain d'y pénétrer, pas même au sien propre. »
« Ce n'est pas de Julie de Wolmar qu'il [Saint-Preux] est amoureux, c'est de Julie d'Etange; […] Il est vrai qu'elle lui ressemble beaucoup et qu'elle lui en rappelle souvent le souvenir. Il l'aime dans le temps passé : voilà le vrai mot de l'énigme. Otez-lui la mémoire, il n'aura plus d'amour. »
Enfin, fort judicieusement, Rousseau a imaginé un dialogue qui devait initialement servir de préface aux Lettres des deux amants. On trouve ce subtil exercice de dialectique à la fin du livre, donnant lieu à des argumentations assez savoureuses et des passages non dénués d’humour comme celui-ci :
« Quel style épistolaire ! qu’il est guindé ! que d’exclamations ! que d’apprêts ! quelle emphase pour ne dire que des choses communes ! quels grands mots pour de petits raisonnements ! Rarement du sens, de la justesse ; jamais ni finesse, ni force, ni profondeur. Une diction toujours dans les nues, et des pensées qui rampent toujours. Si vos personnages sont dans la nature, avouez que leur style est peu naturel ».
Voilà une excellente façon de couper l’herbe sous le pied à ses détracteurs potentiels !
On y lit également : « Leurs lettres n’intéressent pas tout à coup ; mais peu à peu elles attachent ; on ne peut ni les prendre ni les quitter ». Autocritique aussi juste qu’efficace.
Et cette savoureuse réplique de Rousseau à son interlocuteur factice : « Vous parlez des beaux esprits de province, et moi je parle des vrais campagnards. Vous avez, vous autres qui brillez dans la capitale, des préjugés dont il faut vous guérir ; vous croyez donner le ton à toute la France, et les trois quarts de la France ne savent pas que vous existez ».
Et une dernière citation dans un livre si riche que l’on aimerait en extraire des pages entières : « Le plus grand malheur des métiers infâmes est qu’on ne gagne rien à les quitter ». ( )
  biche1968 | May 15, 2021 |
> Par Adrian (Laculturegenerale.com) : Les 150 classiques de la littérature française qu’il faut avoir lus !
07/05/2017 - Le premier roman romantique ? Rousseau exalte les amours de Saint-Preux et de Julie d’Étanges, raconte le conflit entre passion et vertu, magnifie la nature…Un roman oublié de Jean-Jacques, qui eut pourtant une influence considérable !
  Joop-le-philosophe | Jan 26, 2019 |
Ce livre 'doit déplaire aux dévots, aux libertins, aux philosophes ; il doit choquer les femmes galantes, et scandaliser les honnêtes femmes. A qui plaira-t-il donc ? Peut-être à moi seul ; mais à coup sûr il ne plaira médiocrement à personne.'.
  PierreYvesMERCIER | Feb 19, 2012 |
Een echte ontdekking. Rousseau benut alle mogelijkheden van de brievenroman om een romantisch verhaal te vertellen over de jonge leermeester Saint-Preux die een verboden relatie begint met de adellijke jongedame Julie d’Etange. Ogenschijnlijk simpel verhaaltje, maar prachtig gebracht, met een onwaarschijnlijke diepgang en in het mooiste Frans dat je kan vinden. de tweede helft is iets saaier door de lange uitweidingen. ( )
  bookomaniac | Apr 19, 2010 |
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  rouzejp | Sep 2, 2015 |
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Jean-Jacques Rousseauautor principaltodas las edicionescalculado
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"Non la connobe il mondo, mentre l'ebbe: Connobill' io ch a pianger qui rimasi" (Pétrarque).

I. Le monde la posséda sans la connaître,
   Et moi, je l'ai connue, je reste ici-bas à la pleurer. (Pétrarque)
Dedicatoria
Primeras palabras
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"Il faut vous fuir, mademoiselle, je le sens bien: j'aurais dû beaucoup moins attendre; ou plutôt il fallait ne vous voir jamais".
Citas
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"Je goûte le plaisir délicieux d'aimer purement. Cet état fait le bonheur de ma vie; mon humeur et ma santé s'en ressentent; à peine puis-je en concevoir un plus doux, et l'accord de l'amour et de l'innocence me semble être le paradis sur terre".

"N'allons donc pas chercher dans les livres des principes et des règles que nous trouvons plus sûrement au-dedans de nous".

"D'ailleurs ces études énervent l'âme, la jettent dans la mollesse, et lui ôtent tout son réassort".

"vous folâtrez, même avec moi, comme auparavant".
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A novel in which Rousseau reconceptualized the relationship of the individual to the collective and articulated a new moral paradigm

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